Nuit noire (Nelia & Delf)

La nuit noire s’était montrée.
Avec ses étoiles brillantes et son air frais.
Elle était tombée, mais, toi, tu n’avais pas réussi à t’endormir. Alors, doucement, tes pieds s’étaient mis en tête de découvrir la terre, orteils frigorifiés, tu marchais sans but sur le long gazon des jardins. Le regard ailleurs, fixé sur la voie lactée alors qu’aucun sourire ne glissait sur tes lèvres.

Pas ce soir.
Trop de sourires le jour.
Ce soir, c’est cauchemars (souvenirs).

Spoiler:

le jour c'est l'odeur des pains qui te couve. qui te rassure. qui te dit qu'aujourd'hui ça va.
la nuit c'est l'odeur des pins que tu cherches. tu veux te rassurer. te dire que cette nuit n'est pas la dernière.
d'habitude y'a personne.
ce soir y'a quelqu'un. dans les jardins un garçon. qui regarde en l'air comme s'il voulait rallumer la lumière. ou juste regarder les guirlandes de l'univers.
et tu l'observes faire. cet étrange garçon qui a la tête dans le ciel.
et puis un autre comme s'ils se multipliaient.
pleins de garçons, autant que d'étoiles.

Spoiler:

Tu pensais pas que y aurait quelqu’un. Oh ça non.
Alors, tu te sens bête avec tes pieds nus et ta chemise un peu humide sous l’air frais.
T’as l’air d’un égaré, mais, tu l’es peut-être. Un peu comme lui aussi ?
Parce que pour te demander ça, il faut être un peu perdu, surement.

Alors, tu baisses les yeux, et, avant de regarder le visage de la voix, tu croises un autre regard, jeune femme.
D’habitude, t’es tout seul Olav. Mais ce soir y a du monde. Autant de mondes que dans l’univers.

Est-ce un signe ? Un geste pour ne pas te sentir si mal, trop mal ?
Mais pourtant, ton sourire, il a quand même disparu. Trop loin dans le noir.

- Oui, c’est beau non ?

Spoiler:

la vie prend possession des deux garçons. ils bougent, ils se parlent.
ils vivent.
et toi tu regardes de loin sans trop comprendre comment ni pourquoi.
comment on fait pour vivre la nuit. pour continuer à vivre le jour. pour survivre à la vie.
pourquoi ils prennent la peine alors que la mort attend tout le monde au tournant.
peut-être au coin de minuit. à l'ombre d'une aurore boréale. c'est si vite arrivé.
la nuit t'as peur, alors tu regardes les autres vivre pour essayer de comprendre.
pour recopier bêtement leurs gestes.

Quand tu le vois faire.
Quand tu vois ses orteils apparaitre aux côtés des tiens.
Tu peux pas t’empêcher Olav.

De rire, de rire si fort, que c’est à en pleurer.
Si fort que tu pourrais en décrocher les étoiles.

Et tu te demandes comment c’est possible.
Que tu aies réussi à rire ce soir. Que tu aies réussi à sourire ce soir.

Mais peut-être est-ce parce que vous êtes des égarés, l’un comme l’autre.
Lui et toi. Toi et lui. Elle et lui. Lui et elle. Elle et toi. Toi et elle.

Vous.

Des égarés qui s’évadent dans le creux de la nuit noire.
Alors que ton rire l’illumine un peu plus que les étoiles.

Alors tu t’approches un peu plus de lui.
Pour peut-être t’accrocher en cet instant simple.
Et, d’un simple geste, petit mouvement de la main, tu l’appelles, elle.
Elle qui est restée bien loin.

- Ça fait du bien unh ? L’herbe fraiche ?

T’aurais voulu demander autre chose.
Mais, t’as pas osé, car, ce petit sursaut de rire ne suffit pas à tout effacer.
Mais…t’aurais voulu demander, « on est des égarés n’est-ce pas ? »